Atelier 1 : Société

Construire une société respectant l’Accord de Paris d’ici 2050.

6 min readJan 29, 2021

--

Empreinte carbone et comportements en France.

L’empreinte carbone moyenne d’un Français est aujourd’hui d’environ 11 à 12 t CO2e / an. Elle peut se répartir en cinq catégories : Transport 2,9 t CO2e; Logement 2,7 t CO2e; Biens de consommation 2,6 t CO2e; Alimentation 2,3 t CO2e; “Services Publics & Santé” 1,5 t CO2.

Source : Ravijen.fr. Adaptation : l’auteur.

Le visuel ci-dessus ramène l’ensemble des émissions de GES aux comportements des individus : qu’elles soient émises par les individus eux-mêmes, par les entreprises qui produisent des biens, par l’Etat qui les administre, et que ces émissions aient lieu sur le territoire français ou à l’étranger. Par définition, les comportements qui n’émettent pas de carbone n’apparaissent pas sur ce visuel. Les détails du calcul sont sur ravijen.fr.

L’empreinte carbone moyenne devant être d’environ 2 t CO2e par an et par personne d’ici 2050 pour respecter l’Accord de Paris, elle doit être réduite de l’ordre de 80%.

Cette moyenne cache des empreintes carbone très différentes d’une personne à une autre. Il est possible de calculer son empreinte carbone personnelle avec des calculateurs comme NosGestesClimat et MicMac, en fonction du nombre de kilomètres parcourus en voiture, en avion, l’énergie utilisée pour le chauffage, etc. Certaines catégories ne dépendent pas des modes de vie individuels : par exemple “Services Publics & Santé” restent invariants. Baisser ces postes nécessite des politiques publiques comme la rénovation énergétique des hôpitaux.

Comment baisser les émissions de 80% à l’échelle de la société ?

Avant d’évoquer les différentes options, rappelons que les émissions d’une activité ou d’un comportement sont calculées en multipliant son facteur d’émission par la donnée d’activité, c’est-à-dire le volume d’activité, les quantités, la répétition d’une activité.

Un facteur d’émission est la quantité de gaz à effet de serre d’une unité d’activité spécifique. Par exemple, le facteur d’émission d’1 km parcouru avec une voiture moyenne en France est de 0,253 kg CO2e/km, si bien que parcourir 10 km émet 2,53 kg CO2e.

Option 1 : baisser les facteurs d’émission.

C’est le cas lorsqu’on parle d’efficacité énergétique ou de changement de source d’énergie. L’amplitude de baisse potentielle dépend du poste d’émissions :

  • Transports de personnes : réduire la masse d’un véhicule est une solution pour baisser son facteur d’émission. Toute chose égale par ailleurs, remplacer un SUV de 1 500 kg par une Twingo de 750 kg divise par 2 les émissions de CO2e au kilomètre par passager. Dans les deux cas, la masse du véhicule représente l’essentiel de la masse déplacée : seule 1,1 personne est transportée par véhicule en Ile-de-France, le poids moyen d’une personne étant de 63 kg pour les femmes et 77 kg pour les hommes.
  • Alimentation : la réduction potentielle du facteur d’émission d’1 kg de bœuf est très marginale. Les vaches émettent du méthane en rotant et une vache est abattue à l’âge de 2 ans environ : produire les aliments nécessaires émet également des GES, pour leur transport par exemple. Il apparait donc difficile de réduire l’un ou l’autre de ces facteurs. La diminution de l’empreinte carbone de l’alimentation réside ainsi dans le choix des aliments et de leurs quantités respectives, ce qui nous amène à l’option 2.

Historiquement, la baisse de ces facteurs d’émissions est limitée face à la croissance des émissions de GES. Conclusion : travailler sur les facteurs d’émission peut baisser certaines émissions, mais ne parions pas sur des coups de baguette magique.

Option 2 : baisser les volumes d’activité, le levier principal.

Ils impliquent de changer les comportements au quotidien, les usages.

  • Transports : baisser les volumes c’est réduire le nombre de kilomètres parcourus par l’ensemble des individus, en particulier en avion et en voiture.
  • Alimentation : baisser les volumes c’est réduire tout particulièrement sa consommation de viandes et de poissons dont les facteurs d’émissions sont très élevés. En passant d’un régime composé de 100 g de viande par jour à 50 g de viande deux fois par semaine, on opère une division par 7, soit -85% des émissions toute chose égale par ailleurs.

La réduction potentielle des émissions par poste dépend de l’activité.

Pour la catégorie Alimentation, il apparaît difficile de baisser les calories ingérées de 80%… A l’inverse pour les Transports, parcourir 80% de kilomètres en moins pour faire ses courses, aller au travail, à l’école, partir en vacances, est tout à fait envisageable moyennant de nombreuses adaptations : tant individuelles que liées à l’aménagement du territoire.

Les décisions sont individuelles et collectives : les facteurs d’émissions sont en partie déterminés par des politiques publiques structurantes.

Par exemple, un aménagement du territoire qui s’étend sur de grandes surfaces rend l’usage des voitures presque indispensable pour se déplacer, faire ses courses, etc.

Le cas d’école est la comparaison d’Atlanta et de Barcelone. Ces deux villes ont des populations équivalentes mais l’empreinte carbone des transports à Atlanta est 10 fois supérieure à celle de Barcelone ! La ville étant beaucoup plus étendue et les moyens de transports publics limités, l’usage de la voiture est quasi-indispensable.

Construire une société bas-carbone nécessite donc une planification à moyen et long terme de l’Etat, en particulier sur les infrastructures.

A vous de jouer #1 !

✍️ Construisez le budget le plus pertinent selon vous pour atteindre 2 t CO2e / an / personne.

Pour cela, remplacez des postes très carbonés par des postes peu ou pas carbonés, réduisez le volume d’activité de certains postes et les facteurs d’émission.

Commencez dans un premier temps par des estimations dans les grandes largeurs, puis affinez progressivement selon le niveau de détail désiré. Vous pouvez comparer les variations d’empreinte carbone en fonction de comportements grâce aux calculateurs Ecolab et MicMac.

Observations : gérer un budget, c’est choisir ses priorités en fonction de ses besoins. Quelle est votre priorité n°1 ? Je vous propose de choisir l’alimentation. Imaginons qu’en adoptant un régime strict, on réussisse à limiter les émissions de l’alimentation à 500 kg CO2e. Il reste pour tous les autres postes 2 000 kg — 500 kg, soit 1 500 kg CO2e. Quelle est votre priorité n°2 ? Chauffer votre logement ? Disposer de soins publics ? Rouler en SUV ? Construire une maison ? Quelle est votre priorité n°3 ?

Selon vous, quelle serait la répartition la plus pertinente de ce budget carbone entre Alimentation, Transports, Services Publics, Logement et Biens de consommation ? Comment utilisez-vous les deux leviers de baisse du facteur d’émission et de baisse des volumes ?

--

--

I help people and companies build a low-carbon economy, ESCP Affiliate Professor